Décès de Rudy Ray Moore

17 Mars 1927 - 19 Octobre 2008

Mercredi 22 Octobre 2008

Décès de Rudy Ray Moore
Ancien boxeur, devenu artiste de music hall à la fin des années 60, à, l'instar du roublard Redd Foxx, Rudy Ray Moore se rappelant sans doute ses débuts euphoriques de comique troupier à l’armée, n’eut de cesse pendant cette période d’écumer inlassablement les night-clubs. Crooner décadent au langage obligatoirement explicite, apôtre préfigurateur de la diction rap, dix ans avant l’apparition du genre musical, et auteur à partir de 1970 de 18 disques sulfureux vendus sous le manteau, l’excentrique Mister Wonderful fut un artiste bien atypique de la décennie seventies. Acteur culte pour fictions ringardes, il incarna le gras double Dolemite, un Babar Malabar édoniste et nihiliste qui révolutionna le genre kung fu d’un zeste d’humour bubble-gum. En parfait gentleman qui se respecte, Rudy Ray Moore, véritable bête de sexe, su aussi s’entourer des plus belles filles. Adepte tout comme lui des arts martiaux, son armée de Dolemite Girls le suivait dans toutes ses aventures. Grand apôtre précurseur du «Motha’fucka» à chaque coins de phrases, le dingo Dolemite, qui ne mâchait jamais ses mots, n’en fut pas moins homme à soigner chacune de ses répliques grandiloquentes et théâtrales. Le renégat, soucieux de son image, surveillait également ses tenues vestimentaires. Complets vanille, saumon ou pistache du meilleur goût, notre homme ne répugnait pourtant pas à oter son gilet, pour donner le coup de poings à la racaille. Le fantaisiste Moore drainant une véritable cour de fidèle, savait s’entourer à la ville, comme à l’écran, de ses meilleurs complices, le champion de karaté Howard Jackson, coordinateur de toutes ses scènes de combats, le travesti Lord Java pour les opérations séduction, les vedette du show bizz Lady Reed alias Queen Bee et le duo d’humoriste Leroy & Skillet qui partageaient dans la joie et la bonne humeur ses films et ses tournées.

En 1975, l’AIP* refusa le projet Dolemite, autobiographie inavouée de l’artiste qui retranscrivait, d’après les paroles d’une chanson sketch à succès du maître, les déboires d’un comédien propriétaire de night-club un peu mac. Dolemite, double fictif de Rudy Ray Moore qui tirait son nom d’une vitamine aux propriétés régénérescentes avait été produit avec l’argent issu des ventes de disques du fantaisiste, pour le compte de la Dimension Picture. Le film à petit budget avait été réalisé par l’acteur D’Urville Martin, qui interprétait aussi pour l’occasion le méchant de service de l’histoire, et supervisé par Rudy, qui s’improvisait tour à tour acteur, co-producteur et même décorateur sur le tournage. Au final, on regretta que ce Dolemite soit si mal conçu, trop brouillon et meublé par d’interminables longueurs. Rudy Ray Moore ne s’embarrassant pas des détails techniques, à l’instar d’un Ed Wood, il refusait de multiplier les prises, et ne se souciait guère de l’ombre d’un micro à l’image, ou d’un faux raccord. Une scène d’amour de Dolemite fut même amputée, pour éviter le classement X du film. Contre toute attente, le succès commercial de Dolemite fut au rendez-vous, mais Dimension Picture tomba peu après en faillite, et Rudy Ray Moore ne récupéra jamais la mise qu’il avait investi dans son film.

En 1976, Rudy Ray Moore touché par la grâce, imposa définitivement sa marque de fabrique pour l’inénarrable The Human Tornado : Dolemite II de Cliff Roquemore. Avec ses séances de sexe aérobic, ses combats de kung fu accélérés à la sauce Benny Hill, ses séquences d’action passées en replay et ses calembours vaseux, cette séquelle se révéla nettement plus réjouissante que le Dolemite original.
La même année, dans un registre nettement plus sobre, Arthur Marks dirigea l’acteur dans Monkey Hustle, pour le compte de l’AIP qui s’était finalement rendu compte de la manne à exploiter ici. Face à Rosalind Cash, Rudy Ray Moore et Yaphet Kotto formèrent à cette occasion, pour le meilleur et pour le rire, un joyeux duo de frères pétards.

Cliff Roquemore enfonçait de nouveau le clou l’année suivante, avec Petey Wheastraw The Devil’s Son-In-Law, personnage quasi mystique qui tirait son nom d’un chanteur de blues des années 30. Après être tombé sous les balles de deux comiques rivaux, joués par Leroy et Skillet, Petey alias Mr Excitement se retrouvait en enfer et concluait un pacte avec le diable. Il devrait ainsi épouser la fille très laide de ce dernier et pourrait en échange se venger de ses adversaires. Entre deux scènes d’amour orgiaques et un combat avec des démons ringards, notre homme s’amusait avec son bâton magique qui lui donnait le pouvoir de transformer les gros en maigre, ou de punir les importuns en les métamorphosant en chiens !
Avec The Disco Godfather de Robert Wagoner en 1978, notre homme essaya finalement de se racheter une conduite, en surveillant son langage et en réfrénant son activité sexuelle d’ordinaire débordante. Dans le rôle de Tucker Williams, un DJ tout en paillettes, visiblement très influencé par les exploits de John Travolta, l’acteur partit en croisade contre les méfaits du PCP, un dérivé du Crack. Malgré son lot habituel de combats de kung fu ringards, ses chorégraphies à la Saturday Night Fever, et son final délirant qui mélangeait les visions surréalistes d’un exorciste aliéné, les apparitions démoniaques d’un Glen ou Glenda sous acide, et quelques incrustations cartoon du plus curieux effet, ce cinquième et dernier film fut le seul véritable échec commercial de l’acteur.
En 1982, après une courte apparition dans Penitentiary II, au côté de Leon Isaac Kennedy, Glynn Turman et Mr. T, l’acteur Rudy Ray Moore décida finalement de marquer le pas.




Décès de Rudy Ray Moore
Plébiscité et samplé par de nombreux rappers américains, Rudy Ray Moore devenu propriétaire dans les années 90 des droits d’exploitation de ses films géra par la suite sa bonne fortune en exploitant en vidéo le succès de ses exploits d'antan. Son récent Shaolin Dolemite, ennuyeuse compilation de stocks shots kung fu sans intérêt assemblés par un maestro sur le retour, devenu pour l’occasion pilleur de vieilles bandes made in Hong Kong est en revanche complètement passé inaperçu auprès de ses fans.

Prisonnier de son personnage Dolemite, le comique vantard multiplia les apparitions en guest star dans des sous productions hip hop yankees, n’hésitant plus lors des dernières années de sa vie à s’auto-proclamer pionnier inspirateur du mouvement rap en se revendiquant comme étant celui qui posa jadis les jalons d’un cinéma noir américain nouvelle vague qui aura selon ses dires, influencé les plus grands artistes noirs, de Richard Pryor à Spike Lee. On oubliera volontiers ces débordements vaniteux, et on concédera au maître l’attachement réel qu’on lui porte au travers de ses ovnis cinématographiques, qui demeurent aujourd’hui le témoignage unique d’une vision m’as tu vu très dérangeante, véritable ode au psychédélisme vulgaire et voyeur de ces années déviantes.
Après nous avoir laissé en pied de nez son ultime film testament, The Dolemite Explosion [+++], Rudy Ray Moore, très affaibli par son état diabètique nous a quitté ce dimanche 19 octobre 2008. Au pays hasardeux de la série Z psychotique et anxiogène gageons que plus rien ne sera plus jamais comme avant...




*L'A.I.P. ou American International Picture est la firme cinématographique indépendante de Samuel Z Arkoff dans laquelle a officié le célèbre Roger Corman. Cette firme qui a fait de l'ombre à la MGM et à la Warner dans les années 60/70 a financé et distribué nombre de classiques du cinéma bis des drive-in au nombre desquels on peut citer les meilleurs films de bikers de la fin des années 60 et une grande partie des plus gros succès de la Blaxploitation (Coffy, Foxy Brown, Black Caesar, Hell Up In Harlem, Slaughter, Truck Turner, Blacula, Youngblood, etc.).



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