Interview - Lee Fields

Jeudi 25 Février 2010

Lee Fields est allé tellement de fois au tapis en s’en relevant à chaque fois qu’il pourrait donner des leçons à Rocky Balboa lui-même. Retracer toute sa carrière serait trop long, mais deux ou trois choses essentielles survenues dans les 90’s méritent d’être évoquées…


Interview - Lee Fields
Alors proprio de Desco, label monomaniaque du funk abrasif qu’il dirige en bi-place avec Gabe Roth, Philip Lehman contacte le déjà vieux briscard Lee Fields afin qu’il aille arracher quelques titres en compagnie des Soul Providers, le band maison. Remis en jeu, Lee devient tête de gondole du label aux côtés de Sharon Jones et de ce qui constituera la matrice des futurs Dap-Kings. Un retour en grâce qui aura été tout sauf facile…
« Dans les 70’s, j’ai bien vendu surtout quand j’ai enregistré Let’s Take It Over. Mais, quand sont arrivées les 80’s je n’ai quasiment plus rien fait, la musique avait trop changé. Je me suis alors retiré du milieu pour aller travailler dans l‘immobilier... Et puis dans les années 90 je m’y suis remis, j’ai enregistré Enough Is Enough qui a été un gros hit mais dans le milieu Blues. Alors j’ai recommencé à tourner mais dans le circuit Blues cette fois où j’ai côtoyé le top des bluesmen d’alors : Bobby Blue Band, Tyrone Davis, Johnny Taylor. Tous ces artistes avec qui j’ai bossé à cette époque avaient vraiment le Blues dans le cœur. Quand dans les années 90 j’ai quitté le circuit du Blues pour le circuit Soul-Funk suite à l’appel de Lehman et que je me suis mis à tourner avec les Soul Providers puis avec les Sugarman 3, ça été très dur. Il fallu repartir à zéro, que les gens s’intéressent à moi, qu’ils me découvrent. Mais c’est comme ça que ça marche : tu peux être numéro 1 un jour, et plus du tout le lendemain ! »
Et les rares présents lors de la précédente tournée s’en souviennent : Lee démontait des salles et dépensait assez d’énergie pour faire rouler un métro mais devant un public si clairsemé que les premiers rangs distinguaient sans mal les derniers « Les Sugarman 3 étaient vraiment un très bon groupe, le problème c’est que les gens n’étaient pas trop au courant de ce qu’on faisait... Maintenant c’est différent ! ». Ouaip. Maintenant c’est La Revanche de Lee qui fait une tournée blindée jusqu’au bar avec The Expressions, groupe à la colonne vertébrale Daptonienne qui lui déroule le tapis Soul. Tellement Soul que des mauvaises langues se demandent si comme sa consoeur Sharon Jones, Lee n’aurait pas laissé son bon vieux Funk sur le bord de la route : « Naaaa man ! Je suis toujours un funkster ! Mais un funkster qui fait aussi du blues. J’ai travaillé avec des gens différents : Martin Solveig avec qui j’ai enregistré 2 hits, Shawn C et Just Blaze 2 des producteurs de Jay-Z, mais quelque soit le type de musique que je fais, j’essaie toujours d’y mettre tout mon cœur et toute ma Soul. Je suis un vrai Soul Man ! Un Soul Blues Funk Man, voilà ce que je suis ! ».
Comme ça c’est clair.

Une autre chose est claire : si la tournée s’est passée plus que bien, c’est aussi parce que Mister Fields & The Expressions avaient catapulté en 2009 My World (Truth & Soul) un des meilleurs albums de Soul depuis bien longtemps et qui fait déjà office de référence : « Ca été une longue histoire pour faire cet album, ça a pris énormément de temps... J’avais enregistré des titres avec Leon et Jeff (NDR : Michels et Silverman, boss et metteurs en son du label Truth & Soul) mais je ne savais même pas si au final quelqu’un d’autre n’allait pas les refaire… Tout ça a pris tellement de temps que j’avais oublié qu’on travaillait sur un album ! Peut-être qu’ils m’en avaient parlé au début mais ça m’était sorti de l’esprit..En plus, étant donné que je ne suis pas arrivé au studio avec quelques textes en disant «ok, voilà un album ! », l’enregistrement a été très long. Mais Leon et Jeff ont fait tout ce qui était nécessaire pour que je sois satisfait de ce que je faisais. Ils n’étaient pas là à regarder la pendule, c’était plutôt « prend ton temps ». On a donc passé le temps qu’il fallait à perfectionner jusqu’à obtenir ce qu’on voulait vraiment. Eux voulaient LE son, mais pas une simple copie du son des 70’s ! Ils voulaient vraiment le recréer. Et ils y sont arrivés man…
Quand Leon et Jeff m’on fait écouté la version finale, j’ai été très très très surpris, ils avaient fait un tel boulot dessus…quand je l’ai écouté je n’en suis pas revenu ! La façon dont le groupe sonnait, la production, le choix des titres…On a réenregistré Honey Dove (NDR : titre phare de sa carrière), Jeff a mis des paroles sur Money I$ King qui au départ était 100 % instrumental et puis il y aussi le morceau My World, un morceau qui a un fond politique, je ne l’ai pas écrit mais j’en suis tombé amoureux. Même si je pense que les politiciens doivent rester des politiciens, les prêcheurs des prêcheurs et les chanteurs des chanteurs, j’avais tellement accroché sur ce morceau que je devais le faire ! Au final, j’ai co-écrit certains titres mais c’est vraiment à Leon et à Jeff que revient tout le crédit de la réussite de l’album ».

Modeste et pas avare de compliments envers ceux qui ont mis tout leur talent à son service, l’analogie évidente n’inclus donc pas les pires travers d’un James Brown auquel on ne peut s’empêcher de le comparer « Il n’y aucun problème à être comparé au plus grand entertainer de tout les temps ! Mais ce que j’ai fait, je l’ai fait et développé avec un style qui fait que les gens savent que je suis totalement original. Quand le concert est terminé, ils savent qu’ils viennent de voir Lee Fields. Alors oui j’ai été influencé par James Brown, mais aussi par Sam Cooke, Otis Redding, Wilson Pickett, tous les artistes qui ont fait de la Soul Music ce qu’elle est ».
Interview - Lee Fields

Interview - Lee Fields
Bonnet sur la tête et œil espiègle en backstage Lee Fields, une fois son costume de scène revêtu, se branche en mode call and response avec le public et devient un réacteur suant qui n’a pas appris le sens du verbe s’économiser : « Quand on monte sur scène, on essaie de faire le meilleur show possible. On donne tout ce qu’on peut mais l’important ça n’est pas nous, l’important c’est les gens : il faut qu’ils apprécient le show. L’objectif chaque soir c’est de toucher le cœur de public. Je ne chante pas pour que les gens me donnent de l’affection à moi, mais pour qu’ils se rapprochent eux ! Qu’ils soient heureux et que les amoureux le soient encore plus ! C’est ça mon boulot ».
Les dates en France auront permis de vérifier que Lee Fields ne faisait pas le taf à moitié.

Propos recueillis le 14.02.10.
Merci à l' EMB de Sannois, au Ter A Terre crew et à Differ-Ant



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James Brown !
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