Interview - Mark Randolph (Wax Poetics / Blaxploitation)

Mercredi 4 Juillet 2007

Mark Randolph, journaliste New Yorkais participant régulièrement au fabuleux magasine Waxpoetics, « accro » du genre depuis son plus jeune âge. Voici ce qu'en disait la plaquette de promotion du festival Blaxploitation qui a eu lieu à Lille en Février 2007 (>>> détails) :

"De vide-greniers en boutiques vidéos, via aussi plus tard les début de e-bay, Mark tente de satisfaire son insatiable passion / collection / obsession, en accumulant matériel promo original, ainsi que les versions mexicaines, qui, plus rares, étaient souvent aussi plus riches en couleurs vives, photomontages, peintures, et commentaires dramatiques. "

J'ai voulu en savoir un peu plus sur cette passion et c'est donc lors de la soirée suivant le vernissage de l'expo, le 23 février dernier, que j'ai rencontré Mark qui a gentiment accepté de répondre à quelques questions :

Interview - Mark Randolph (Wax Poetics / Blaxploitation)
Bonsoir Mark ! Tout d’abord est-ce la première fois que tu viens en France ?

En effet c'est la toute première fois, et je suis très content de l’accueil ! J’apprécie vraiment ce séjour !

Parlons un peu de cette passion pour la « blaxploitation » dont tu viens nous parler ces jours-ci en nous présentant ta collection personnelle. Je crois que c’est ton frère qui t’as fait découvrir ce genre cinématographique ?

Mon frère m’a en effet initié aux films blaxploitation. Il nous disait de descendre chez lui pour regarder avec lui les films blacks qu’il avait l’habitude d’aller voir au cinéma lorsqu’il était plus jeune, adolescent, dans les années 70. Il en possédait de nombreuses copies sur VCR ( nos K7 vidéo ), le vieux modèle, celui où l’on posait la K7 par-dessus !

Tous ces films sont-ils disponibles aujourd’hui, en DVD notamment ?

Et non… certains sont disponibles en DVD, d’autres en K7 vidéo, et beaucoup sont encore indisponibles. Certaines copies de copies circulent, issues d’enregistrements faits directement dans les salles de cinéma, mais pas toutes les copies d’origines.



Interview - Mark Randolph (Wax Poetics / Blaxploitation)
J’ai lu dans Waxpoetics que l’un de tes premiers souvenirs de films blaxploitation est « Black Gestapo ». ça reste un de tes préférés ?

Non, pas vraiment. Je crois que mon préféré est "Sweet Sweetback's Baadasssss Song" de Melvin Van peebles, en 1971, parce que c’est là que tout a commencé. C’est lui qui a fait le genre « blaxploitation », tel qu’on le voit aujourd’hui, qui a construit le cadre du genre blaxploitation : tu as un héros noir, ou un anti-héros d’ailleurs, qui se bat pour la justice, en dehors de la société blanche traditionnelle. C’est pourquoi c’est en quelque sorte un héros pour les noirs américains à cette époque.

Ce film peut aussi être considéré comme le plus « politique » de ce genre appelé la « blaxploitation »...

En effet je dirais que c’est l’un des plus politiques. Il sort à une époque où la politique tient une place très importante dans ces films. Les fringues, le sexe, la violence et les drogues y sont alors moins importants. Le truc le plus important est alors la politique.




Tout cela a ensuite beaucoup changé d’après toi ? la politique a tenu un rôle de moins en moins important ?

Oui, de 1969 à 1975, c’est vraiment l’âge d’or de la « blaxploitation ». Mais au fur est à mesure de l’évolution du genre, la qualité des films diminue. Le message politique s’efface de plus en plus et on n’exploite le filon du sexe, de la violence et des drogues dans les scénarios. Les films sont donc de moins en moins intéressants à partir de 1974-1975-1976.

A ton avis, pourquoi cette évolution ? Pense tu que les messages politiques diffusés par ces films ont pû être considérés comme dangereux, donnant une « mauvaise influence » aux publics ?

Finalement, je crois que la réponse est plutôt à chercher du côté de l’économie. Au moment du déclin de la « blaxploitation » vers 1975, apparaissent de nombreux blockbusters hollywoodiens comme Star Wars et Rocky. Les dirigeants hollywoodiens, les producteurs de films n’ont plus alors vraiment besoin d’un public spécifiquement noir. Les noirs vont alors voir les films blancs traditionnels, on n’a plus besoin de faire des films « noirs », et a fortiori des films noirs avec des vrais sujets. Ce déclin des films blaxploitation s’accompagne aussi d’un déclin des personnages noirs dans le cinéma en général.


Interview - Mark Randolph (Wax Poetics / Blaxploitation)
Que penses – tu justement de la place des personnages noirs dans le cinéma à cette époque ? En France par exemple, les deux grandes séries marquantes où apparaissent des noirs sont « Arnold et Willy » et « Starsky et Hutch » où les noirs, quand ils se trouvent du côté des « bons » sont présentés ou comme des maquereaux balances de la police ou comme des bonhommes sympathiques mais bourrus …

Oui, Huggy Bear, etc … finalement je crois que vous avez vu ce qu’on a bien voulu vous montrer … aux Etats-Unis, tout n’est pas parfait, mais on a une plus large palette, qui va de Denzel Washington aux films de Spike Lee, John Singleton, etc. qui donne une toute autre image des noirs aux cinéma … mais je pense qu’en France, comme aux Etats-Unis, on sait bien que toutes les séries TV ont besoin de stéréotypes. Ils ont propagé certaines idées aux Etats-Unis, qu’ils ont ensuite voulu propager dans le monde entier …


Et finalement peut être avons-nous ici accepté certains stéréotypes sur les Américains qui nous arrangeaient bien …

Et, oui, les stéréotypes sur les Américains en général, c’est certainement ça …

Parlons un peu de la musique de ces films. Souvent les B.O. ont énormément participé au succès des films. Puisque tu t’intéresses, par ta collection personnelle que tu viens nous présenter ici, aux différentes formes de promotion de ces films, quel y est pour toi le rôle jouait par la musique ?

Les B.O. et les films marchaient vraiment « main dans la main ». Le genre « blaxploition a été créé à peu près à la même époque que la musique Funk. Tu avais James Brown, Curtis Mayfield, Roy Ayers… tous ces artistes ont connu un énorme succès à l’époque même où la « blaxploitatiion » est devenu populaire. Ils ont alors commencé à enregistrer les BO de ces films. En fait, l’explosion de la Funk et de la blaxploitation arrivent à peu près au même moment.

Tu n’as pas l’impression que les BO de ces films sont meilleures que les films qu’elles accompagnent ?

Je ne sais pas vraiment si c’est toujours le cas, mais pour certaines en effet je crois qu’elles sont plus intéressantes. Les gens entendent et apprécient ces BO, ils se demandent d’où vient cette musique et cherchent finalement à découvrir le film… c’est sans doute pourquoi on a l’impression que les BO sont meilleures, la musique nous plait et le film découvert plus tard pas forcément. Parfois c’est mieux, parfois c’est l’inverse… c’est comme ça !

Y a-t-il pour toi aujourd’hui des films qui peuvent être comparés à ces films blaxploitation des 70’s ?

Hum… c’est une bonne question… voyons… Il n’y a pas tellement de très bonnes séries TV qui traitent de la culture noire ou de trucs ces temps-ci … on en trouvait peut être un peu plus avant. On a besoin de nouveaux créatifs au sein de la communauté noire afin de développer une image positive sans tomber dans les stéréotypes… On a vraiment besoin de ça en ce moment, il n’y a vraiment pas d’image réellement positive des noirs à la TV … Il y a quelques trucs par ci par là, comme parfois Denzel Washington ou d’autres acteurs, mais pas vraiment de genre en soi comme la blaxploitation …


A ce sujet, l’une des séries les plus populaires ici ces dernières années fut "Le Prince de Bel-Air". tu penses quoi de ce genre de shows ?

Le Prince de Bel-Air avait ses aspects positifs mais bon… Finalement il s’agissait d’une sorte de « poisson jeté hors de l’eau », avec ces mecs noirs sortis du ghetto et placé dans cette soi-disant élite du monde blanc. Bien qu’ils soient encore noirs finalement ils sont blancs culturellement, la culture de l’argent, de la haute société, du succès. Alors dans un sens ça perpétue l’idée d’une culture blaxploitation, mais dans un sens négatif, mais si c’est très populaire.

Enfin, est-ce que tu t’intéresses aux films d’exploitation étrangers de cette époque ? Les films français par exemple ?

Je ne connais pas grand choses aux films français d’exploitation de cette époque. Je connais un peu les films italiens, comme les premiers spaghettis-westerns avec Clint Eastwood, mais pas tellement les films français… J’aimerais d’ailleurs vraiment découvrir les films de cette époque, les idoles, creuser un peu plus pour savoir ce qu’il se passait alors en Europe, à l’époque où le genre blaxploitation était créé aux Etats-Unis.

Merci beaucoup Mark d’avoir répondu à ces questions, bonne fin de séjour en France et à bientôt peut être.

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Cinéma noir: la "blaxploitation" Un article pour en savoir plus sur la blaxploitation

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