Disquaire indépendant depuis 1996 situé au 40, rue des fontaines, 60600 Clermont de l'oise

Je me suis en sorte comme aguerri à cette pratique, celle de l’immersion totale, en apnée, comme un être qui ne craindrait pas l’asphyxie, je retourne le plus profondément possible, et retrouve ces coraux, ces courants chauds, ces créatures des grands fonds que j’aime passionnément .

Le temps est clément, la mer est calme, je plonge…

J’entre dans cette salle ou règne une ambiance des plus recueillie, un public vient ici toucher du doigt la pureté même, un homme à la voix enchanteresque, accompagnée par des musiciens ne formant qu’un tout pour servir à ce chanceux auditoire la plus belle messe jamais enregistrée…



Premier palier avec cette introduction magnifique , cette reprise de la plus belle œuvre de Marvin Gaye, What’s going on ?

Magistralement interprétée, d’une justesse confondante, Donny Hathaway est en prise directe avec les anges, ce sont eux qui lui insufflent ce timbre clair, ce phrasé généreux, il n’a qu’a les laisser habiter tout son être, et puisque son esprit entier n’est que dévotion, les témoins de ce qui va suivre se sentiront à leur tour investis par une osmose à laquelle il est totalement impossible de résister…

On sent déjà ces spectateurs conquis, abdiquant définitivement devant ce miracle, cette somme de perfection atteinte pour que chacun puisse libérer la moindre emprise, le moindre frein…

Ce chanteur a trouvé un jour la longueur d’onde qui fait se déclencher l’ouverture des vannes de chaque âmes.., tentez d’y résister, vous ne le pourrez pas, laissez la vous emplir , rentrer en vous, et gardez en à jamais le souvenir, il vous sera précieux ..



IL reprendra Marvin dans un rythme bien différent qu’à l’original, transformant cet hymne en un titre plus syncopé, lui donnant une couleur plus propice à la danse tout en se l’appropriant d’une façon désarmante… une version alternative que n’aurait pas même rêvé son créateur…

C’est dans un silence des plus feutré que les premières notes de cette deuxième chanson planent maintenant…

Les doigts coulent, parcourent le clavier tels un préambule à un prochain voyage.

C’en est un, il va nous emmener de l’autre coté, là ou vivent nos semblables, « On The Other Side Of Town » comme le chantait si bien son ami de toujours …

Les nappes qui flottaient laissent place maintenant à un instant d’une rare singularité, une spectatrice vient de s’exclamer au beau milieu de ce moment magique…

« Allright, this is it !!!! »

Je fonds littéralement sur la combinaison totalement inattendue de la solennité de ce silence, et du cri libérateur de cette spectatrice..
Elle donne une dimension tout à fait interactive, comme pour vous rappeler que vous n’écoutez pas cet album seul dans votre salon, qu’il y a là toute une foule qui elle aussi trépigne d’impatience pour transcender cet instant prodigieux.

Donny sait tout cela, il l’a si souvent perçu. Il va s’employer donc encore cette fois à tenir son public à la force de sa voix, et de le lui faire visiter, ce ghetto…

Comme une caméra se baladant, filmant ces enfants jouant avec la pompe à incendie dans le Bronx, comme ces groupes réunis au pied d’un immeuble du Queens , comme le visage si souriant de cette femme enlaçant son chérie , celui de ces jeunes filles portant des couettes se rendant à l’école, le visage de ce vieil homme à qui l’on donnerai cent ans , ces carcasses de voitures amoncelées, ces flics suffocant derrière leurs lunettes noires, ces immeubles délabrés reflétant l’abandon total d’une société qui se refuse à voir ce coté obscur, et qu’il faille mieux ignorer plutôt que de tenter une approche même compassionnelle…


Mais bien qu’il narre là des quartiers dont on n’imagine pas la souffrance de ceux qui y vivent, il choisi une mélodie positive et dansante, traduisant d’une façon éblouissante une vérité que beaucoup ignore et qui indiffère…Ce peuple a construit une harmonie face à cette immonde indifférence, et vie évidemment les choses d’une façon insouciante, S’accommodant du peu qu’ils possèdent, et des joies les plus simples que la vie offre..

En cela ils en ressortent plus forts et plus heureux que d’autres, et savent que rien n’est finalement plus beau que de prendre cette revanche quotidienne sur l’apitoiement…

Ladies ?!!

Oui elles vont chanter…Oh que oui !!…

Aucunes phrases, aucuns textes…

Juste ce « Talking ‘bout the ghetto »

Mon dieu, c’est à pleurer, elles sont toutes là , consciente de la force exceptionnelle de la musique.. Jamais une telle liesse n’a été ainsi captée et gravée pour l’éternité.

Il règne alors quelque chose qui a attrait à la prouesse, les spectateurs semblent incroyablement libérés.. La transe atteins son point le plus culminant, et c’est le moment que choisi Donny pour y mettre fin, comme pour éviter a certain de sombrer définitivement et de sortir sur une civière…

Mais à peine sent ont la pression retomber, qu’une autre chanson vient la récupérer et construire autour d’elle comme un instant salvateur…


Cette chanson : « Hey Girl », qui survient maintenant, a comme un parfum bienfaiteur, elle est là pour lier magnifiquement l’enthousiasme de la précédente à un autre voyage , une autre histoire d’amour , une rencontre qu’il perçois déterminante.

Il y chante toute sa fragilité, annonce à cette fille dont il est tombé éperdument amoureux qu’il n’on pas beaucoup de temps, que la vie est si courte, qu’il lui faille prendre conscience d’une chose miraculeuse…Le timbre de Donny est si généreux, si sincère et naturel que l’on croirait que cette fille est là, présente, parmi nous, assistant à une déclaration inattendue en direct, couvrant son visage des deux mains pour cacher ces larmes de bonheur…


Aux toutes premières notes de « You Got A Friend », des cris de joie dans le public témoignent instinctivement de la parfaite connaissance de son répertoire par quelques spectateurs.

C’est comme s’ils avaient attendu jusque là pour montrer le meilleur d’eux même ; on ne sais plus s’il l’on assiste là à un concert , ou à un enregistrement inopiné dans une chapelle…
Chacun des spectateurs connaît le refrain par cœur, et l’entame frénétiquement, franchissant un nouveau seuil dans l’art d’exalter ..
Ecoutez les reprendre « You just call up my name… » et sentez cette jubilation vous toucher à présent, vous rappelant qu’un jour , vous aussi, vous pourriez avoir besoin de cet ami, et que cette ode n’a finalement de sens que si à votre tour vous proposiez votre épaule sur laquelle se blottira une âme à consoler…

Une chanson merveilleuse qui sonne comme l’hymne à l’amitié par excellence, au sens le plus fraternel du terme, qui devrait être connu de tous pour que l’on ne craigne jamais plus de déranger la seule et dernière personne qui saura écouter vos tumultes…


Voici la face B..

B comme Black, Brotherhood, et Believing…

Elle démarre en nous rappelant l’importance de nos dix premières années…
Période ou certain auront la chance d’évoluer dans un univers ou la vie s’écoule tranquillement, une famille unie, des pic nic dans un parc, des vacances au bord de la mer, des parents attentionnés et disponibles, suivant vos études pour vous préparer à affronter cet avenir incertain…
Donny va narrer là une toute autre enfance…ce « Little Ghetto Boy » qui n’a pas les mêmes cartes en main, son jeu est incomplet, il devra composer avec elles et ne pourra certainement pas se permettre l’économie d’en abattre certaines plus tôt que prévu , comme ce joker si utile pourtant, qui disparaitra pour sauver sa propre peau peut être..., cet As de cœur qu’il faut conserver et auquel on tient tant..
Sont jeu était faussé dès le départ, mais il ne l’apprendra que bien plus tard…mais qu’importe, Donny sait qu’elles sont toutes magiques, même si la dame de cœur a la peau blanche…

We’re still friends…comme si l’on ne pouvait pas échapper à son destin, Donny fait de rencontrer un couple au hasard dans une rue après qu’ils aient rompu, et s’avouent l’amitié qu’ils se portent l’un à l’autre malgré les blessures encore profondes, une chanson magnifique, pleine d’espoir, un moment figé ou la réminiscence se fait plus optimiste, pour rappeler peut être à chacun qu’une vie est possible, même après le chagrin et la detresse..

Empruntée à John Lennon, « Jealous Guy », dans une version soul au possible, dans un timbre toujours aussi éclatant et limpide…
Ce chanteur aurait pu s’approprier le moindre standard pop et en faire quelque chose de merveilleux, la beauté de sa voix exclue toute critique possible, et cette reprise va a ravir à cet homme habité par des tumultes insondables…

13.40 mn de groove lancinant, « Everything is Everything » des solos énormes, un public trépignant de joie, un titre de près d’un quart d’heure dont j’aimerai découvrir une version inédite de plus du double …

Ce disque est le Live le plus important de la musique noire, il y transpire la sincérité de bout en bout, vous prend par la main, et vous emmène visiter votre propre sensibilité.

Il est trop rare de voir se déployer autant d’amour dans un disque pour que vous puissiez l’ignorer plus longtemps…Alors ouvrez grande la porte de votre cœur, jamais il n’aura été aussi comblé…

Rédigé par Michel Guinand le Mercredi 1 Juin 2011 à 12:07 | 0 commentaire Notez | 0 commentaire


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