Interview - James 'Plunky' Branch (Oneness Of Juju)

Mercredi 9 Mai 2007

Interview réalisée le 26 Mars 2006 à Marseille lors du festival Bol de Funk.


Première question concernant vos concerts en France, c'est votre deuxième fois ici, comment vous sentez-vous, comment trouvez-vous les fans ?

Jusqu’ici les fans ont été géniaux et je trouve ça génial.
C'est peut-être la tournée qui va me changer la vie. Je suis reconnaissant que non seulement des fans plus âgés semblent apprécier la musique mais également des nouveaux gens plus jeunes, je pense qu'on est en train de les convertir...


Retournons au passé, j'aimerais bien savoir d'où vient le nom Oneness of Juju ?

Je crois que le nom Juju a été trouvé à San Francisco en 1972, nous l'avons choisi d'abord parceque nous voulions un nom africain, nous ne faisions pas référence à la musique nigérienne Juju.

Nous avons choisi le nom, non parce que nous savions ce que c'était la musique Juju, mais plutôt comme une inspiration.

Interview - James 'Plunky' Branch (Oneness Of Juju)

Parlez-moi du Label Strata East ? Comment êtes-vous arrivé là-dessus, c’était comment de bosser avec eux et comment avez-vous fait les 2 albums ?

Interview - James 'Plunky' Branch (Oneness Of Juju)
Strata East était une entité commerciale importante car c'était la première fois que des Afro-Américains géraient la partie commerciale de l'industrie.

Pendant 50 ans, les musiciens étaient les musiciens, point. Et voilà qu'on a Stanley Cowell et Charles Tolliver qui ont commencé leur label, avec le but de le gérer et de prendre la main sur leurs carrières. Lorsque nous avons entendu parler de leurs efforts ils avaient déjà fait peut-être trois ou quatre albums et nous étions excités de se dire « voici une entreprise noire de Jazz où les musiciens s'auto-produisent et sortent leurs propres disques ».

Ce label était basé à New York et nous à San Francisco, nous avions décroché une date à New York pour un festival, nous sommes donc venu rendre visite à Strata East. Nous avions enregistré l'album qui deviendrait "A message from Mozambique" >>> écouter des extraits avant de quitter SF donc nous avions une cassette avec nous et avant d'aller ailleurs nous sommes allés à Strata East pour les rencontrer.
Ils ont entendu notre musique et immédiatement ils ont dit "OK vous pouvez nous rejoindre", ils étaient intéressés qu'on se rejoigne à eux, en tant qu'égaux. Il n’y avait pas d’hiérarchie, genre un président et puis les petits musiciens, tout le monde était au même niveau.

Vous avez parlé de Gil Scott Heron, alors lui, Mtume et Oneness of Juju étions les jeunes du label, les autres musiciens étaient un peu plus âgés et un peu plus conservateurs. Ils n’étaient pas sûrs lorsqu'ils ont démarré le label qu'ils étaient prêts pour ce côté politique que nous trois, nous amenions. Mtume avait fait un album pour Strata East appelé "Alkebu-lan land of the blacks" qui était très nationaliste et Oneness of Juju avait fait 'Juju" qui était Jazz-Africain avant-gardiste et Gil Scott-Heron avait sa poésie politique, il parlait de Watergate, donc tous les musiciens plus âgés n’étaient pas sûrs qu'ils étaient prêts pour ce qu'on faisait. Il y avait deux camps différents dans le label. Je suis devenu très bon ami avec Mtume et Gil Scott-Heron à cette époque et on se considérait comme des jeunes révolutionnaires en quelque sorte, les jeunes lions du Label.

Ce fut une expérience très positive pour moi, parce que j'ai pu apprendre le côté « affaires » de l'industrie et en même temps rencontrer des musiciens plus expérimentés, qui nous ont aidés dans nos carrières, mais on les a aidés aussi car à mon avis le label était beaucoup plus passionnant/intéressant grâce à ces jeunes qui se frayaient un chemin, une nouvelle direction.
En fait l'album de GSH a probablement vendu 10 fois plus que n'importe quel autre album du label. On était important pour eux, et vice-versa.

Vous êtes resté deux ans et puis vous avez quitté le label ?

Bon, après ces 2 premières années, il y a eu une sorte de schisme, une rupture. Comme je l'ai dit, cette rupture est née des musiciens jazz plus traditionnels qui s'inquiétaient que le label prenne une direction trop avant-gardiste ou même trop funk. Le disque de GSH était un tel succès, on pourrait croire que ça a eu un effet positif mais en fait ça dérangeait certains musiciens parce qu'ils trouvaient cela trop commercial. Ce succès commercial a mené le label dans une nouvelle direction en termes financiers, mais il y avait trop de disputes sur la direction que le label devait prendre donc j'ai décidé de monter mon propre label "Black Fire".

J’ai bossé avec des mecs de Washington. Jimmy Gray avait été le distributeur pour Strata East dans la zone de Washington D.C., donc je me suis mis à travailler avec lui et on est devenus partenaires pour démarrer notre label.

On s’est dits : « on peut faire la même chose depuis Washington » et on a eu pas mal de succès. Je suis content qu’on l’ait fait, parce que, encore une fois, ça fait partie de l’expérience d’apprentissage.

Et si j’avais une chose à dire à des jeunes musiciens, je dirais, « n’ayez pas peur de vous frayer votre propre chemin, de prendre de nouvelles directions musicales »
A un moment donné, Jazz était nouveau, plus maintenant, mais à l’époque si.
Au début des années 80, le Hip Hop était une nouvelle direction.
On trouve de grands succès lorsque nous avons la force de foncer tout seul.

Et quand vous vous êtes mis au funk, c'était aussi une nouvelle direction ?

Oui c'était une nouvelle direction pour un musicien de Jazz parce que nous avions été associé au mouvement Jazz avant-gardiste et les gens comme Sun Ra, Paroah Sanders, John Coltrane, Ornette Coleman... On ne lie pas ces noms au Funk.
Et avant nous, on n'associait pas forcément la musique africaine et le Funk ou le Jazz et la musique africaine. Il y en avait qui le faisaient, je dis pas que je l’ai inventé, mais nous étions un des premiers à combiner ces musiques de cette manière.
Donc oui c'était une nouvelle direction pour un tel groupe « Jazz avant-gardiste » de passer à la musique Afro-Funk.

Dans les années 80 beaucoup d'artistes ont disparu ou ont perdu leur inspiration, comment avez-vous vécu cette période, comment expliquez-vous cette situation, comment vous sentiez-vous pendant ces années-là ?

Je pense que c'est une réaction naturelle pour certains musiciens qui avaient un certain niveau de popularité, quand le marché change, ça peut être très décourageant. Aux Etats-Unis nous avons une culturel jetable où l'on met un musicien sur un piédestal un jour et six mois plus tard on le jette pour s'intéresser à un nouveau, on est toujours à la recherche du nouveau "plus jeune".

Plus la musique ou le groupe vieillissent, plus ils perdent en popularité et le label les jette à la poubelle, ils ne peuvent plus enregistrer, le public ne s'y intéresse plus donc ils cherchent à faire autre chose, ils enseignent ou, ils quittent le milieu complètement.
C'est compréhensible aussi qu'en vieillissant, les musiciens aient d'autres responsabilités financières. Quand on est jeune, on joue même si on ne gagne pas d'argent, on le fait pour l'amour de la musique, mais avec l'âge, on a des enfants, on a des factures à payer, et si on se dit "il y a personne qui soutien ce disque, aucune maison de disque ne veut le sortir" alors on quitte le milieu...

Pour les musiciens comme moi, j'ai pu rester dans la musique car je faisais autre chose. J'ai pu enseigner à l'école parce que ma musique est très diverse et je suis très versatile, je peux jouer dans les petites salles, je peux jouer dans les musées, pas seulement dans les boites de nuit, donner des conférences et surtout je produis, donc j'utilise mon temps pour étudier les nouveaux médias, j’ai construit un home-studio pour faire enregistrer d'autres gens, les musiciens plus jeunes pour avoir des idées fraîches, ça me permet de rester actif.
Il y a eu une période où je n'ai pas beaucoup joué, commercialement, j'ai pas fait de tournée en boîte de nuit mais j'ai pu gagner ma vie dans mon Etat, la Virginie. J'ai joué dans les universités, je produisais.

Pourquoi êtes-vous retourné vivre en Virginie ?

Je suis originaire de Virginie, je suis allé à New York pour étudier à l'université de Columbia et puis, parce que je me suis impliqué politiquement, j'ai déménagé à San Francisco pour m’aérer la tête pendant 2 ou 3 ans, puis je suis revenu à la maison, c’était plus facile pour fonder une famile.

J'imagine que vous êtes déjà allé en Afrique, quand était la dernière fois et quelles ont été vos impressions ?

Je suis allé en Afrique 6 ou 7 fois, je ne me rappelle pas de la première fois mais au moment où j'ai réussi à y aller, ça faisait déjà 20 que je faisais de la musique et autant d'années que je voulais y aller. Je n'ai pas aimé le Niger autant que j'ai aimé le Ghana.

Le Niger et plus particulièrement Lagos, c'était une très grande ville, très dure, abrasive. Ghana était plus détendu, plus cool, plus en ligne avec ce que j'aime.
D'y aller était une expérience gratifiante, j'ai eu l'occasion de jouer avec Sunny Ade, avec Fela, j'ai rencontré Asante et beaucoup d'autres musiciens.
Je suis allé à Ghana faire une tournée pour leur "Commission des enfants", puis après avec Oneness of Juju et Asante.
C'était à la fin des années 80s, début années 90s.
L'Afrique est un endroit important pour moi, mais maintenant je crois que l'Europe sera important pour moi, pour l'avenir. Surtout par rapport à ce qui se passe en ce moment, avec la sortie du nouveau DVD en France et j'espère que ça sera important pour les musiciens et les fans aussi, parce que je pense que même si ce n'est pas une direction totalement différente, nous représentons cette idée de Jazz et Hip Hop et l'Afrique, on fait des déclarations et on unit les gens, je pense que c’est une bonne chose.

Vous êtes allé au Brésil et au Cuba aussi, c'était pour de nouveaux projets ?

Je suis allé au Brésil pour créer la musique pour un film, pour un ami. Il m'a demandé d'y aller pour étudier la musique et de faire la B.O. de son film.
Je suis allé au Cuba pour la même raison, mais pour un documentaire sur l'île.

J'ai pris mon fils avec moi, un producteur de Hip Hop, nous y sommes allés deux fois, et pendant qu'on était là, nous filmions pour nous-même. Le film de mon ami n'est jamais sorti, mais nous avons fait un film sur la musique afro-cubaine à partir des rushes qu'on a pris sur place. Ça s'appelle "Under the radar - A survey of afro-cuban music; C'est un projet personnel, c'est une direction que je souhaite prendre, faire des vidéos et documentaires, utilisant plusieurs médias pour faire passer le message de notre musique.
Comme j'ai dit on a sorti un DVD "Live in Paris" cette année et je suis plus excité par la partie docu du DVD !

Nous avons également un DVD que nous faisons nous-même qui s'appelle "African Rhythms 2006", c'est un court clip musical de cette chanson et 10 autres morceaux.
Nous commençons à avoir un beau catalogue multimédia, ça représente une nouvelle direction, nous faisons un DVD sur notre musique et l'histoire de la musique.

En savoir plus :

LIENS

www.plunkyone.com
www.myspace.com/plunkyandoneness

CHRONIQUES

DVD & CD Live in Paris - 2006 >>> lire
Plunky & Oneness - Got To Move Something - 2002 >>> lire
Oneness of Juju - African rhythms 1970-82 - 2002 >>>lire

DISCOGRAPHIE

Plunky - Cold Heat 2006 écouter
Plunky & Oneness of Juju - Everyway but loose 1984
Plunky & Oneness of Juju - Electric Juju Nation 1982
Oneness of Juju - Bush Brothers & Space Rangers 1978
Oneness of Juju - Space Jungle Luv 1976
Oneness of Juju - African Rhythms 1975 écouter
Juju - A Message From Mozambique 1973 écouter

Bio & discographie sur www.plunkyone.com/bio.html

INTERVIEW

Interview de James "Plunky" Branch, leader de Oneness of Juju >>> lire

Interview - James 'Plunky' Branch (Oneness Of Juju)
Le nom du groupe à l'origine était Juju (1971-74), then Oneness of Juju (1975-81); puis Plunky & Oneness of Juju (1982-88); et plus récemment Plunky & Oneness (1988 - présent).

Vidéo - The Drop


Vidéo - Under the Radar : A survey of Afro-Cuban Music


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